Conclusion

Victor Segalen et Bartabas réalisent donc un voyage en Chine, du moins allégoriquement pour Bartabas, mais surtout un voyage vers soi, en soi. Se découvrir autrement : se faire face. Se regarder extérieurement n'est pas autre chose qu'un nouveau point de vue sur ce que l'on pensait connaître. En cela, s'appréhender comme un inconnu revient à réfléchir sur notre considération du monde et des autres. Altérité humaine mais aussi animale, végétale... Le champ de réflexion est infini.
Pour y parvenir, les domaines artistiques semblent prédisposés. Surprenant le public, lecteur ou spectateur, le produit médiatique, littéraire, théâtral est source de nouveaux points du vue sur le monde. Ses pratiques doivent cependant trouver de nouvelles écritures afin de parvenir à se détacher de la pensée dominante. C'est pour cela que, du corporel au virtuel, le cheminement ne se dévoile que par fragments. Mais cette impénétrabilité - cette connaissance réduite à l'indice - doit être préservée. C'est ce que fait Bartabas qui présente, sans expliquer, une multitude d'altérités impénétrables mais auxquelles le public est sensible.
Ces fragments artistiques ne sont que le reflet de notre connaissance fragmentaire et impuissante de nous-même. Réfléchir sur soi, bâtir fragmentairement son identité-racine pour ensuite l'ouvrir à une identité-rhizome n'est autre que le chemin vers soi qui fait sentir le Divers dans toute son altérité. Victor Segalen et Édouard Glissant semblent coïncider dans leurs approches du monde. C'est du lieu qu'ils tirent leurs inspirations, c'est vers les autres qu'ils se tournent. Le médecin écrivain avait peut être réussi à entrer dans le Tout-Monde encore en latence d' Édouard Glissant...